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Aurélie Dauger et Hélène Cloëz vous proposent de retrouver régulièrement une sélection de l’actualité légale et jurisprudentielle en droit de la construction et de l’urbanisme.

Droit de la construction

Du nouveau sur les travaux de terrassement : constituent-ils un ouvrage ?

Cass. civ. 3ème, 10 novembre 2021, n°20-20294

A l’occasion de la survenance d’un sinistre à l’issue de la première phase de travaux (terrassement) mais avant le commencement de la seconde phase (de construction d’un bâtiment), la question se posait de savoir si des travaux de terrassement constituent un ouvrage.

Confirmant l’arrêt critiqué, la Cour de cassation indique que dans la mesure où :

-les travaux de terrassement et d’aménagement n’incorporaient pas de matériaux dans le sol au moyen de travaux de construction,

-et que le sinistre s’était produit avant réalisation de tout ouvrage.

Ces travaux ne constituaient pas un ouvrage et ne rentraient donc pas dans les prévisions de l’article 1792 du Code civil, et ceci même si l’entreprise avait connaissance d’un futur projet de construction.

Du nouveau sur les conditions et conséquences de la réception tacite

Cass. civ 3ème, 1er avril 2021, 20-14975

La Cour a rappelé que la réception tacite suggère une volonté non équivoque du maître d’ouvrage de prendre réception, qui est inexistante lorsque celui-ci a contesté la qualité des travaux exécutés et sollicité la désignation d’un expert judiciaire.

A noter que la signature d’un procès-verbal de réception entre le maître d’ouvrage et l’architecte ne vaut pas présomption de réception tacite à l’égard de l’entrepreneur dès lors que celui-ci n’a pas été convoqué.

Cass. civ 3ème 20 octobre 2021, 20-20428

La Cour rejette cette demande en retenant qu’elle vise à contourner l’exigence du respect du contradictoire Cass. civ 3ème 20 octobre 2021, 20-20428.

Il a enfin été précisé qu’en l’absence de réception de l’ouvrage, l’action en responsabilité du maître d’ouvrage à l’encontre de l’entreprise principale se prescrit par cinq ans à compter du dommage, et ne bénéficie pas du délai de 10 ans de l’article 1792-4-2 du Code civil (Cass. civ 3ème, 16 septembre 2021, 20-12372)

Du nouveau sur le contrat de contractant général est un contrat d’entreprise et non un mandat

Cass., civ. 3è, -10 novembre 2021, n°20-19.372

A l’occasion de la construction d’un immeuble, le schéma contractuel suivant a été mis en place :

Les paiements dus à l’entreprise étaient garantis par un cautionnement donné sur le fondement de l’article 1799-1 du Code civil, lequel s’est avéré insuffisant eu égard aux évolutions budgétaires et calendaires du projet. L’entreprise a interrompu ses travaux jusqu’à augmentation de l’engagement de caution. En retour, le contractant général a résilié son marché. S’estimant victime d’une résiliation abusive, et d’un refus de fourniture de la garantie de paiement prévue à titre impératif par la loi n°75-1334 du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance, l’entreprise a assigné le contractant général, le promoteur et le maitre d’ouvrage en paiement de sommes.

En première instance, le contractant général a été condamné.

La Cour de cassation a rejeté le pourvoi du contractant général, indiquant qu’à l’inverse du contrat de promotion, le contrat de contractant général n’est pas un mandat général mais un contrat d’entreprise assorti de prestations de maîtrise d’œuvre. Les actes conclus par le contractant général sont donc des sous-traités soumis à la loi de 1975.

A noter en outre que la Cour a jugé la résiliation valable, car l’entreprise a abandonné son chantier, dès lors qu’elle aurait du faire usage non pas de la faculté de suspension offerte par l’article 1799-1 du Code civil, mais de la faculté de résiliation ouverte par l’article 3 de la loi de 1975.

Ce que cela implique

Cette solution est bienvenue car le contrat de contractant général, issu de la pratique anglo-saxonne, ne bénéficie d’aucun régime propre en droit français ce qui est source de méprises sur son régime.

Du nouveau sur l’action directe à l’égard de l’assureur RC

Cass., civ. 3ème, 20 octobre 2021, n°20-21.129

La cour de cassation rappelle que l’assureur de responsabilité civile peut faire l’objet d’une action directe après l’expiration du délai de prescription concernant la responsabilité de son assuré par l’effet du jeu de la prescription biennale qui ne commence à courir que du jour où son assuré a été assigné (en référé expertise en l’espèce) et ouvre de ce fait un délai de deux ans supplémentaire au cours duquel il peut être assigné par le tiers victime.

Ce que cela implique

Cette règle du « 10 + 2 » joue pour tous types d’assurance y compris dommages-ouvrage: une action indemnitaire contre lui est donc possible, sous certaines conditions, jusqu’à 12 ans après la réception.

Droit de l’urbanisme

Du nouveau sur le Certificat d’urbanisme et bénéfice de la cristallisation quand le refus de permis de construire a été annulé

CE 24 Novembre 2021 n° 437375

Pour rappel, les dispositions de l’article L 410.1 du code de l’urbanisme relatives aux certificats d’urbanisme ont pour effet de garantir, à la personne à laquelle a été délivré un certificat d’urbanisme, quel que soit son contenu, un droit à voir sa demande de permis de construire, déposée durant les dix-huit mois qui suivent, examinée au regard des dispositions d’urbanisme applicables à la date de ce certificat.

Le Conseil d’Etat a jugé que lorsqu’une demande de permis de construire est déposée dans le délai de dix-huit mois à compter de la délivrance d’un certificat d’urbanisme, et que suite à contentieux, le refus opposé à la demande de permis de construire est annulé, cette annulation ne prive pas le demandeur du droit à voir sa demande examinée au regard des dispositions d’urbanisme en vigueur à la date du certificat. L’administration étant, par l’effet de l’annulation du refus, à nouveau saisie de la demande de permis de construire, le pétitionnaire peut bénéficier de « la cristallisation » du certificat d’urbanisme.

Du nouveau sur le sursis à statuer prononcé par le juge et refus de la mairie de délivrer le permis de régularisation

CE, 9 novembre 2021, n°440028 

Lorsque le juge prononce un sursis à statuer sur la légalité d’un permis de construire sur le fondement de L. 600-5-1 du code de l’urbanisme, il appartient au pétitionnaire de régulariser le permis de construire.

En principe, dès lors qu’un permis de régularisation est produit devant le juge, seuls des moyens dirigés contre ce permis de régularisation en tant qu’il ne  régularise pas le permis initial, peuvent être invoqués.

Le Conseil d’Etat précise qu’en revanche, si aucun permis de régularisation n’est produit, il appartient au juge de prononcer l’annulation du permis de construire, même si l’impossibilité de produire ce permis de régularisation vient du refus opposé par le maire à la demande de régularisation présentée par le bénéficiaire de l’autorisation.

Ainsi, le juge doit annuler le permis de construire non régularisé sans avoir à contrôler la légalité du refus opposé par la mairie à la demande de régularisation.

Du nouveau sur le retrait d’une demande de pièces complémentaires : quelles conséquences sur l’obtention de l’autorisation ?

CAA de Marseille, 1ère chambre, 14/10/2021, 19MA00872

Lorsque le demandeur d’une autorisation d’urbanisme n’a pas reçu de réponse pendant la période d’instruction de son dossier, il doit en principe être considéré comme étant titulaire d’une autorisation tacite au terme du délai d’instruction.

Si pendant le délai d’instruction les services instructeurs sollicitent la transmission de pièces complémentaires, le délai d’instruction ne commence pas à courir tant que le demandeur n’a pas produit ces pièces complémentaires de sorte qu’il ne peut se prévaloir d’aucune autorisation tacite.

Mais que se passe-t-il si, après avoir sollicité du demandeur la production de pièces complémentaires, les services instructeurs retirent leur demande de pièces complémentaires ?

La Cour administrative d’appel de Marseille a jugé que le retrait par les services instructeurs de leur demande de pièces complémentaires interrompt le délai d’instruction, de sorte que ce retrait ne rend pas le demandeur, titulaire d’une autorisation tacite, du fait de l’écoulement du délai d’instruction à compter de la date de dépôt de sa demande.