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Smart News | Droit de la construction et de l’urbanisme

 

Aurélie Dauger et Hélène Cloëz vous proposent de retrouver régulièrement une sélection de l’actualité légale et jurisprudentielle en droit de la construction et de l’urbanisme.

Droit de la construction

Du nouveau sur l’actualité jurisprudentielle : Non souscription de la DO – préjudice certain et préjudice moral indemnisable

Cass., civ. 3ème, 2 mars 2022, n° 21-10.753

Un entrepreneur s’était vu confier la construction d’un bâtiment à usage professionnel pour un prix qui comprenait la souscription d’une assurance dommages-ouvrage pour le compte du maître d’ouvrage. Or, l’entreprise ne la souscrit pas.

La Haute juridiction valide l’indemnité allouée au maître d’ouvrage à ce titre évaluée au coût de souscription de cette assurance, en précisant qu’il s’agit de dommages et intérêts et non pas d’une réfaction du prix.

En revanche, elle refuse d’indemniser le préjudice allégué par le maître d’ouvrage résultant de la dépréciation de l’immeuble en cas de vente dans les 10 ans de la réception puisqu’ il n’était pas justifié d’une vente et/ou de dommages de nature décennale, de sorte que ce préjudice n’était qu’éventuel.

A noter la mention relative au fait que les demandeurs au pourvoi ne sollicitaient pas la réparation du préjudice moral lié à l’insécurité engendrée par l’absence d’assurance décennale. Il est donc possible a contrario  d’en déduire que cette demande, si elle avait été formée, aurait pu prospérer. La question de l’évaluation d’un tel préjudice reste entière.

Ce que cela implique

La non souscription de l’assurance DO par un cocontractant qui s’y est engagé est sanctionnée à l’aune du préjudice certain subi par le MO.

Du nouveau sur l’actualité jurisprudentielle : Une fois l’immeuble vendu, le vendeur n’est plus responsable des troubles anormaux de voisinage

Cass., civ. 3è, 16 mars 2022, n°18-23.954, publié au bulletin

Quelques semaines après la vente d’une maison, les occupants du pavillon voisin se sont plaints d’un dégât des eaux provenant des canalisations du bien vendu, et ont assigné les nouveaux propriétaires en réparation de leurs préjudices sur le fondement du trouble anormal de voisinage. Ceux-ci, estimant que ce trouble préexistait à la vente, ont appelé en garantie les vendeurs.

La Cour d’appel de Paris a condamné les acquéreurs à réparer 60% du préjudice des voisins mais a refusé de retenir la responsabilité des vendeurs.

Les acquéreurs se sont donc pourvus en cassation, motif pris d’une violation du principe en vertu duquel nul ne peut causer à autrui un trouble anormal de voisinage, en ce que le vendeur serait responsable du trouble anormal de voisinage causé avant la cession par l’immeuble vendu.

La Cour de cassation rejette le moyen en rappelant que l’action fondée sur un trouble anormal du voisinage est une action en responsabilité civile extracontractuelle indépendante de toute notion faute, seulement attachée à la seule qualité de voisin. Ainsi, peu importe que l’origine du trouble de voisinage soit apparue avant la vente de l’immeuble.

Ce que cela implique

Cet arrêt est à prendre en compte par exemple dans le cadre d’une vente en état futur d’achèvement. Le vendeur ayant réalisé les travaux, il conviendra de prévoir dans l’acte de vente qu’il garantira l’acquéreur de tous troubles de voisinage résultant de ces travaux, même en sas d’action postérieure à la vente et à la livraison.

Du nouveau sur l’actualité jurisprudentielle : Garantie décennale : le maître d’ouvrage doit démontrer que les conditions d’application de l’article 1792 du Code civil sont réunies

Cass. civ. 3ème, 2 mars 2022, n°21-10753, publié

Des travaux de construction d’un bâtiment à usage professionnel ont été réceptionnés sans réserve. L’immeuble a ensuite été cédé à une SCI et donné à bail à un preneur.

Sur le fondement de la garantie décennale, se plaignant d’une non-conformité des bois des terrasses, la SCI et le preneur ont assigné le constructeur, lequel soutenait en réponse qu’il appartenait au maître d’ouvrage de rapporter la preuve que le défaut de conformité allégué n’était pas apparent le jour de la réception sans réserve.

La Cour d’appel a retenu la responsabilité décennale du constructeur, dès lors qu’il ne rapportait pas la preuve que le défaut de conformité était apparent lors de la réception sans réserve.

La solution est censurée par la Cour de cassation au visa de l’article 1353 al1 du Code civil : il incombe au maître d’ouvrage qui se fonde sur l’article 1792 du Code civil de rapporter la preuve que ses conditions d’application sont réunies.

A noter le rappel de la Haute juridiction d’un arrêt précédent du 7 juillet 2004, refusant l’application de la garantie décennale à défaut de démonstration du caractère caché des désordres à la réception, le maître d’ouvrage ne rapportant pas la preuve du contenu des réserves.

Ce que cela implique

La réception sans réserve purge les vices et non-conformités apparents.

Avant d’agir sur le fondement de la garantie décennale, il convient de vérifier que ses conditions d’application sont réunies : le désordre doit être caché à réception, révélé dans le délai de la garantie, et présenter soit une atteinte à la solidité, soit une impropriété à destination.

Du nouveau sur l’actualité jurisprudentielle : Procès-verbal de réception signé par une entreprise en liquidation judiciaire

Cass. civ. 3ème, 2 mars 2022, n°20-16787, publié

Une société était chargée de la réalisation de travaux d’aménagement. La retenue de garantie avait fait l’objet d’un remplacement par une caution bancaire.

Le procès-verbal de réception a été signé par le directeur général de cette société le jour même d’un jugement prononçant la liquidation judiciaire.

Dans le cadre d’une action au titre de la garantie de parfait achèvement, le maître d’ouvrage entendait mobiliser la caution, en se fondant sur cette réception, dont la validité était contestée par la caution.

La Cour d’appel a écarté le procès-verbal de réception au regard de la règle de dessaisissement de l’article L. 641-9 du Code de commerce: le directeur général n’était plus habilité au jour de sa signature à le faire. La demande du maître d’ouvrage était donc écartée.

La censure de la Cour de cassation intervient sur le même fondement en précisant que le dessaisissement de cet article, à l’exception des actes conservatoires, est édicté dans l’intérêt des créanciers, et que seul le liquidateur peut s’en prévaloir.

Or, le procès-verbal de réception, qui, compte tenu de ses conséquences, ne constitue pas un simple acte conservatoire, ne pouvait donc pas être écarté.

Ce que cela implique

Seul le liquidateur est recevable à se prévaloir de l’inopposabilité du procès-verbal de réception signé par le constructeur dessaisi par l’effet de sa mise en liquidation judiciaire.

Une double signature du liquidateur et du dirigeant est à privilégier pour éviter toute difficulté.

 

Droit de l’urbanisme

Du nouveau sur la réglementation : Evaluation environnementale : Parution du décret introduisant la « clause filet »

Décret n° 2022-422 du 25 mars 2022 relatif à l’évaluation environnementale des projets

Ce décret a créé l’article R. 122-2-1 du code de l’environnement qui permet à l’autorité compétente de soumettre à examen au cas par cas tout projet, situé en deçà des seuils fixés par la nomenclature annexée à l’article R. 122-2, susceptible d’avoir des incidences notables sur l’environnement ou la santé humaine.

Pour rappel, le Conseil d’Etat, dans une décision du 15 avril 2021, avait enjoint au gouvernement d’adopter un dispositif permettant de soumettre tous les projets à une évaluation environnementale afin, notamment, d’être en conformité avec les exigences du droit de l’Union européenne.

Tous les projets, même les plus petits sont visés par le décret, y compris les projets d’extension ou de modification.

L’autorité compétente chargée de la première demande d’autorisation ou de déclaration relative au projet doit décider, dans un délai de 15 jours à compter du dépôt du dossier de demande, si le projet doit être soumis ou non à examen au cas par cas et en informe le maitre d’ouvrage.

Le maître d’ouvrage peut également, de sa propre initiative, saisir lui-même l’autorité chargée de l’examen au cas par cas.

Les dispositions du décret sont applicables aux premières demandes d’autorisations ou déclarations d’un projet déposées à compter de la date d’entrée en vigueur du décret, le 27 mars 2022.

Du nouveau sur l’actualité jurisprudentielle : Assiettes de la taxe d’aménagement et de la redevance d’archéologie préventive en cas de reconstruction ou agrandissement de bâtiments

CE, 31 mars 2022, n°460168

Après avoir rappelé que la taxe d’aménagement est assise sur la surface créée telle que définie au dernier alinéa de l’article L. 331-10 du code de l’urbanisme, à l’occasion de toute opération d’aménagement, de construction, de reconstruction ou d’agrandissement de bâtiments, le Conseil d’Etat précise que :

  • doit être regardée comme une reconstruction, une opération comportant la construction de nouveaux bâtiments à la suite de la démolition totale des bâtiments existants. Dans ce cas, cette taxe est assise sur la totalité de la surface de la construction nouvelle, sans qu’il y ait lieu d’en déduire la surface supprimée. De même lorsque l’opération consiste en la reconstruction après destruction totale d’une partie divisible de bâtiments existants.
  • Une opération ayant pour conséquence une augmentation nette de la surface d’un bâtiment préexistant doit être regardée comme un agrandissement et que, dans ce cas, la taxe d’aménagement est assise sur la surface créée, déduction faite de la surface supprimée.

Il rappelle ensuite que la redevance d’archéologie préventive est assise sur la surface créée à la suite de la réalisation de travaux affectant le sous-sol et soumis à une autorisation d’urbanisme et qu’est sans incidence sur la détermination de l’assiette de cette redevance, la circonstance que la réalisation de travaux affectant le sous-sol ait donné lieu à la suppression de surfaces existantes. Ainsi, les personnes soumises au versement de la redevance d’archéologie préventive ne peuvent, pour ce qui concerne les opérations d’agrandissement d’un bâtiment existant qui affectent le sous-sol, déduire de l’assiette de la redevance d’archéologie préventive la surface supprimée.