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Smart News | Droit de la construction et de l’urbanisme

Aurélie Dauger et Hélène Cloëz vous proposent de retrouver régulièrement une sélection de l’actualité légale et jurisprudentielle en droit de la construction et de l’urbanisme.

Droit de la construction

Du nouveau sur l’actualité jurisprudentielle : Publication de l’ordonnance n°2022-1076 du 29 juillet 2022 visant à renforcer le contrôle des règles de la construction

Prise en application de l’article 173 de la loi du 22 aout 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, l’ordonnance du 29 juillet 2022 vient modifier la partie législative du Code de la construction et de l’habitation notamment sur les points suivants :

  • Renforcement de l’efficacité du régime de contrôle des règles de la construction: la police administrative est autorisée à utiliser des outils mieux adaptés (visites sur sites, désignation d’un contrôleur technique, mises en demeures, possibilité de suspension des travaux, retraits d’agréments…) et peut appliquer des sanctions administratives pouvant viser tous les intervenants à l’acte de construire ainsi que le propriétaire de l’immeuble.
  • Clarification de la liste des attestations exigées (i) au moment du dépôt de la demande de PC et (ii) à l’achèvement des travaux.

A noter une nouvelle attestation « risque de retrait et gonflement des argiles » exigée à l’achèvement des travaux et la suppression de « l’attestation de réalisation de l’étude des solutions d’approvisionnement en énergie » au moment du dépôt de la demande de PC jugée moins utile depuis l’entrée en vigueur de la RE 2020.

Plusieurs décrets doivent être pris pour mettre en musique les nouvelles dispositions qui doivent s’imposer à compter du 1er janvier 2024.

Ce que cela implique

L’objectif affiché est d’améliorer l’efficacité du contrôle des règles de construction afin d’en améliorer la qualité, qu’il s’agisse des règles de sécurité ou de la performance énergétique et environnementale des bâtiments.

Une rigueur technique et administrative est donc requise.

Du nouveau sur l’actualité jurisprudentielle : Seul le maître d’ouvrage a qualité pour mettre les entreprises en demeure de reprendre les désordres dans le cadre d’une déclaration de sinistre dommages ouvrage

Cass., civ. 3è, 7 septembre 2022, n°21-21.382, publié au bulletin

Conformément aux alinéas 9 et 10 de l’article L.242-1 du Code des assurances, l’assurance dommages ouvrage peut garantir des sinistres intervenus avant l’expiration de l’année de parfait achèvement, voire avant réception lorsque le marché a été résilié pour inexécution de ses obligations par l’entrepreneur. Dans ces deux cas, la garantie ne peut intervenir qu’à la condition que l’entrepreneur ait été mis en demeure de reprendre les désordres.

C’est dans ce cadre qu’un maître d’ouvrage a assigné son assureur dommages ouvrage, à qui il reprochait d’avoir refusé sa garantie pour des désordres décennaux survenus avant réception, dans le cadre d’un marché résilié, au motif que l’entrepreneur n’aurait pas été valablement mis en demeure. Le maître d’ouvrage estimait que cette mise en demeure avait été valablement faite par l’architecte, car le contrat de maîtrise d’œuvre chargeait l’architecte de « l’établissement et l’envoi des courriers de toutes natures nécessités par [sa] mission afin d’assurer une qualité parfaite et le respect de son planning » et faisait interdiction au maître d’ouvrage de « donner directement quelque ordre que ce soit aux entreprises ».

La Cour de cassation confirme l’analyse de la Cour d’appel qui a considéré qu’il ne résultait de ces stipulations aucun mandat confié par le maître d’ouvrage à l’architecte pour réaliser la mise en demeure prévue par l’article L.242-1 du Code des assurances.

Ce que cela implique

Le maître d’ouvrage, co-contractant de l’entreprise, conserve en cette qualité certaines prérogatives, sauf à les déléguer aux termes d’un mandant exprès.

De telles problématiques peuvent aussi se rencontrer dans les contrats de VEFA, le vendeur se réservant souvent la possibilité de mettre en demeure les entreprises.

Du nouveau sur l’actualité jurisprudentielle : La démolition, une sanction encadrée

Cass., 3ème civ. 13 juillet 2022, n° 21-16.407

Les acquéreurs d’un lot dans un lotissement ont assigné le propriétaire d’un lot riverain pour obtenir la démolition d’un immeuble construit en violation du cahier des charges du lotissement.

La Cour de cassation a approuvé la Cour d’appel d’avoir jugé qu’il existait une disproportion manifeste entre le coût de la démolition pour le débiteur et son intérêt pour le créancier, de sorte qu’elle a rejeté la demande d’exécution et a parallèlement ordonné l’allocation de dommages intérêts.

Cette décision marque un revirement jurisprudentiel puisque auparavant, la violation du cahier des charges impliquait de manière incontournable la démolition, indépendamment de l’existence ou de l’importance du préjudice.

Ce revirement s’inscrit dans un mouvement jurisprudentiel qui tend à limiter la sanction de la démolition notamment dans des cas d’empiètement au regard du principe de proportionnalité (Cass. 3e civ. 17 novembre 2021 n°20-17.218 ; Cass. 3e civ. 10 novembre 2021 n°20-17.218).

Ce que cela implique

La démolition n’est plus une sanction automatique de la violation du cahier des charges d’un lotissement.

Droit de l’urbanisme

Du nouveau sur la réglementation : Notion de permis de construire modificatif plus souple

CE, Section, 26 juillet 2022, req., n° 437765

Le Conseil d’Etat assouplit les conditions de délivrance d’un permis de construire modificatif en le rapprochant de celles du permis de régularisation obtenu dans le cadre d’un contentieux contre le permis de construire.

Rappelons que la notion de permis modificatif est purement jurisprudentielle et qu’en dehors de tout contentieux, il ne doit pas avoir pour effet, par sa nature ou son ampleur, « de porter atteinte à la conception générale du projet initial » ou de « bouleverser l’économie générale du projet ». Si tel est le cas, une nouvelle demande de permis de construire doit être déposée.

L’arrêt cité rompt avec la jurisprudence en vigueur depuis 1982 et vient élargir le champ d’application du permis modificatif en remplaçant la notion « d’atteinte à la conception générale du projet » par celle de « bouleversement tel qu’il en changerait la nature même ».

La question qui se posait en cassation était celle de savoir si les modifications autorisées en 2019 entraient dans le champ d’application du permis modificatif, ou si un nouveau permis était en réalité nécessaire.

Faisant application de la notion de « bouleversement de la nature même du projet », le Conseil d’État estime que les changements autorisés ne nécessitaient pas l’obtention d’un nouveau permis.

Cette jurisprudence permettra de procéder à des modifications sur un projet par permis modificatif pour des modifications plus importantes que des modifications mineures.