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Nous vous proposons de retrouver régulièrement une sélection de l’actualité légale et jurisprudentielle en droit social.

ACTUALITÉ

Principales mesures de la loi adaptant le Code du travail au droit de l’Union européenne
Durée d’indemnisation des salariés chômeurs à compter du 1er février 2023

JURISPRUDENCE

Limitation des motifs de licenciement en cas de reconnaissance de l’inaptitude d’un salarié
Appréciation de la dégradation de l’excédent brut d’exploitation justifiant l’existence de difficultés économiques
Incidence de la rédaction de la dispense de recherche de reclassement par le médecin du travail
Portée de la garantie d’emploi conventionnelle du salarié en arrêt maladie
Indemnisation des victimes d’accident du travail ou de maladie professionnelle pour faute inexcusable
Les critères permettant la fixation du nombre et du périmètre des établissements distincts sont librement fixés par l’accord d’entreprise
Précisions sur l’indemnisation des travailleurs exposés à l’amiante
Précisions sur les conditions de validité d’un accord de performance collective
Le nombre de salariés concernés par l’inexécution d’un accord collectif est sans incidence sur le droit d’agir du syndicat
Saga Uber : Les contrats de partenariat qui lient les chauffeurs à la société Uber sont requalifiés en contrat de travail

 

ACTUALITÉ

Principales mesures de la loi adaptant le Code du travail au droit de l’Union européenne

La loi « portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans les domaines de l’économique, de la santé, du travail, des transports et de l’agriculture » ajuste plusieurs dispositions du Code du travail au droit de l’Union européenne :

  • Congés de paternité et d’accueil de l’enfant :
    •  ce congé est assimilé à du temps de travail effectif pour la détermination des droits que le salarié tient de son ancienneté ;
    •  ce congé est assimilé à une période de présence dans l’entreprise ;
    •  le salarié conserve le bénéfice de tous les avantages acquis avant le début du congé ;
  • Congé parental d’éducation :
    •  en cas de passage d’un temps plein à un temps partiel dans le cadre de ce congé,  la durée du congé est assimilée à une période de travail effectif pour la détermination des droits que le salarié tient de son ancienneté ;
    •  en cas de passage d’un temps plein à un temps partiel dans le cadre de ce congé, le salarié conserve le bénéfice de tous les avantages acquis avant le début du congé ;
    •  en cas de congé à temps plein, le congé est pris en compte pour moitié seulement concernant la détermination des droits tirés de l’ancienneté ;
  • Congé de présence parentale :
    • ce congé est pris en compte en totalité pour la détermination des droits que le salarié tient de son ancienneté ;
    • le salarié conserve le bénéfice de tous les avantages acquis avant le début du congé ;
  • Remise au salarié de documents sur la relation de travail : l’employeur doit désormais remettre au salarié un ou plusieurs documents écrits contenant les informations principales relatives à la relation de travail ;
  • Suppression des durées de période d’essai plus longues prévues par accord de branche : la dérogation permettant aux accords de branche conclus avant la date de publication de la loi n° 2008-596 du 25 juin 2008 de prévoir des durées de période d’essai plus longues que les durées maximales légales et supprimée ;
  • Information des salariés en CDD ou en intérim sur les postes disponibles en CDI : quand ces salariés en font la demande, l’employeur doit les informer des postes en CDI à pourvoir au sein de l’entreprise.

Loi n° 2023-171 du 9 mars 2023 portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans les domaines de l’économie, de la santé, du travail, des transports et de l’agriculture.

 

Durée d’indemnisation des salariés chômeurs à compter du 1er février 2023

  • Une durée d’indemnisation réduite de 25% : le décret introduit notamment une modulation de la durée d’indemnisation des demandeurs d’emploi « en fonction de la situation du marché du travail ».
    Les modalités de calcul de la durée d’indemnisation demeurent inchangées, mais il est appliqué à cette durée un coefficient égal à 0,75, le nombre de jours en résultant étant arrondi à l’entier supérieur.
    Cette modulation s’appliquera aux droits ouverts au titre des fins de contrat de travail intervenues à compter du 1er février 2023.

 

  • Un complément de fin de droits : afin de tenir compte de l’évolution de la situation du marché du travail, le décret prévoit la possibilité d’un allongement de la durée d’indemnisation via l’attribution d’un complément de fin de droits en cas de dégradation du taux de chômage en France.
    Le complément de fin de droits s’appliquera aux demandeurs d’emploi arrivant au terme de leur indemnisation, à compter du premier jour du mois portant publication d’un arrêté constant que l’une des deux conditions suivantes est réalisée :

    • soit une augmentation de 0,8 point ou plus du taux de chômage en France au sens du Bureau International du Travail (BIT) ;
    • soit l’atteinte d’un taux de chômage égal ou supérieur à 9,0% ;

 

  • Un complément de fin de formation : le demandeur qui, au terme de son indemnisation, suit une formation, peut dans certains cas bénéficier d’un complément de fin de formation qui allonge la durée d’indemnisation jusqu’au terme de la formation.

 

Le complément de fin de formation s’appliquera aux demandeurs d’emploi qui suivent une formation qui :

  • est qualifiante au sens de l’article L. 6314-1 du Code du travail ;
  • est inscrite au projet personnalisé d’accès à l’emploi (PPAE) ;
  • dont la durée est de minimum 6 mois.

Décret n° 2023-33 du 26 janvier 2023 relatif au régime d’assurance chômage.

 

JURISPRUDENCE

Limitation des motifs de licenciement en cas de reconnaissance de l’inaptitude d’un salarié

La Cour de cassation considère qu’un salarié déclaré inapte par le médecin du travail ne peut pas faire l’objet d’un licenciement pour un motif autre que l’inaptitude.

En l’occurrence, un salarié en arrêt de travail a été convoqué par l’employeur a un entretien préalable à un licenciement disciplinaire. Parallèlement, il est déclaré inapte par le médecin du travail à l’issue d’une visite de reprise. L’employeur poursuit toutefois la procédure disciplinaire et procède au licenciement du salarié pour faute lourde.

Le salarié conteste son licenciement en faisant valoir que les règles d’ordre public relatives au licenciement du salarié inapte excluent tout licenciement disciplinaire postérieur à l’avis d’inaptitude. En effet, lorsqu’un salarié est déclaré inapte du fait d’une maladie ou d’un accident, l’employeur ne peut rompre le contrat de travail que s’il justifie de l’impossibilité de lui proposer un emploi approprié à ses capacités ou du refus par le salarié de l’emploi proposé ou encore lorsque le médecin du travail indique que tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi.

L’argumentaire du salarié est suivi par la Cour de cassation qui estime qu’un salarié déclaré inapte ne peut être licencié pour un motif autre que l’inaptitude et ce, même si une procédure disciplinaire a été engagée antérieurement à l’avis d’inaptitude.

Cass. soc., 8 février 2023, n° 21-16.258.

 

Appréciation de la dégradation de l’excédent brut d’exploitation justifiant l’existence de difficultés économiques

Les difficultés économiques peuvent être caractérisées selon l’article L. 1233-3 du Code du travail par l’évolution significative d’au moins un indicateur économique. Il peut s’agir notamment d’une baisse des commandes ou du chiffre d’affaires, des pertes d’exploitation ou encore d’une dégradation de la trésorerie ou de l’excédent brut d’exploitation mais aussi par tout autre élément de nature à justifier de ces difficultés.

Concernant l’excédent brut d’exploitation, le code du travail, contrairement à la baisse de commandes ou au chiffre d’affaires, exige simplement une évolution significative sans pour autant fixer une durée pour apprécier les difficultés économiques qui résulteraient d’une dégradation de l’excédent brut d’exploitation.

En l’occurrence, la Cour de cassation en accord avec la cour d’appel considère qu’une évolution significative est caractérisée par la dégradation sérieuse et durable de l’excédent brut d’exploitation dès lors qu’il était fortement négatif en 2014, 2015 et 2017 et ce, même s’il était positif en 2016.

A cette occasion, la Cour de cassation rappelle également que l’augmentation du chiffre d’affaires de l’année précédant la rupture du contrat de travail du salarié est indifférente dès lors que les difficultés économiques peuvent être caractérisées par la seule dégradation sérieuse et durable de l’excédent brut d’exploitation.

Cass. soc., 1er février 2023, n° 20-19.661

 

Incidence de la rédaction de la dispense de recherche de reclassement par le médecin du travail

En matière de licenciement pour inaptitude, l’employeur est dispensé de son obligation de rechercher un reclassement et procéder à la rupture du contrat de travail si l’avis d’inaptitude du médecin du travail indique que « tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé » ou « que l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi ».

La Cour de cassation dans deux arrêts du même jour précise les conditions d’application de cette dispense.

Elle considère d’abord que l’avis d’inaptitude mentionnant que « l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi » permet à l’employeur d’engager la procédure de licenciement sans recherche préalable de reclassement. En effet, la notion « d’emploi » dispense de toute recherche de reclassement dans le périmètre de l’entreprise mais aussi du groupe contrairement à ce que soutenait le salarié.

En revanche, l’avis d’inaptitude précisant simplement que l’état de santé du salarié « fait obstacle à tout reclassement dans un emploi dans cette entreprise » ne dispense pas l’employeur d’une recherche de reclassement. En l’occurrence, l’employeur devait opérer des recherches au niveau du CSE ayant embauché le salarié mais également au niveau de l’entreprise ayant institué l’instance, ces deux entités constituant un groupe de reclassement.

En conséquence, le licenciement prononcé est privé de cause réelle et sérieuse.

Cass. soc., 8 février 2023, n° 21-19.232 et n° 21-11.356.

 

Portée de la garantie d’emploi conventionnelle du salarié en arrêt maladie

Les clauses de garantie d’emploi prévues dans certaines conventions collectives interdisent à l’employeur de rompre le contrat de travail d’un salarié malade pendant une certaine période même si l’absence du salarié perturbe le bon fonctionnement de l’entreprise.

En l’occurrence, un salarié soumis à la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie conteste son licenciement pour insuffisance professionnelle intervenu au cours d’un arrêt de travail.

L’article 16 de la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie prévoit une garantie d’emploi pendant toute la durée d’indemnisation du salarié à plein tarif. A l’issue de la durée d’indemnisation à plein tarif, l’employeur pourra prendre acte de la rupture par force majeure du contrat de travail par nécessité de remplacement effectif. En outre, il est indiqué qu’« au cours de l’absence de l’ingénieur ou cadre pour maladie ou accident, l’employeur peut rompre le contrat de travail en cas de licenciement collectif ou de suppression de poste, à charge pour lui de verser à l’ingénieur ou cadre licencié l’indemnité de préavis […] et de régler l’indemnité de congédiement ».

La Cour de cassation, en censurant la cour d’appel, estime que ces dispositions conventionnelles n’interdisent pas le licenciement du salarié pendant la suspension de son contrat de travail pour maladie pour d’autres causes que la maladie, la garantie d’emploi pour une durée déterminée n’étant prévue que pour le licenciement à la suite d’une absence pour maladie et nécessité de remplacement.

En conséquence, l’employeur pouvait légitimement licencier le salarié pour insuffisance professionnelle dès lors qu’il n’était pas tenu par la garantie d’emploi conventionnelle.

Cass. soc., 8 février 2023, n° 21-16.805.

 

Indemnisation des victimes d’accident du travail ou de maladie professionnelle pour faute inexcusable

La Cour de cassation opère un revirement de jurisprudence en matière d’indemnisation de la faute inexcusable.

En cas d’accident du travail ou de maladie professionnelle, les salariés peuvent solliciter la reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur devant le pôle social du Tribunal judiciaire. Si la faute inexcusable de l’employeur est reconnue, le salarié peut bénéficier d’une majoration de sa rente d’incapacité permanente outre la réparation de préjudices notamment celui causé par ses souffrances physiques et morales.

La Haute Juridiction estimait jusqu’à lors que la rente d’incapacité permanente indemnisait d’une part les préjudices professionnels (perte de gains professionnels et incidence professionnelle) et d’autre part, le déficit fonctionnel permanent qui recouvre notamment les souffrances physiques et morales. Le salarié devait donc démontrer que l’éventuel préjudice lié à des souffrances physiques et morales n’était pas déjà indemnisé à ce titre, preuve difficile à apporter en pratique.

Désormais, l’indemnisation de ce préjudice sera facilitée puisqu’il est admis que les souffrances physiques et morales endurées par une victime peuvent faire l’objet d’une indemnisation complémentaire dès lors que la rente n’a ni pour objet ni pour finalité une telle indemnisation et ce, sans apporter la preuve que ce préjudice n’est pas couvert par la rente.

Les salariés pourront donc désormais prétendre à une indemnisation complémentaire distincte de la rente d’incapacité permanente dans la mesure où cette dernière n’indemnise pas le déficit fonctionnel permanent.

Cass. ass. plén., 20 janvier 2023, n° 21-23.947 et 20-23.673.

 

Les critères permettant la fixation du nombre et du périmètre des établissements distincts sont librement fixés par l’accord d’entreprise

Dans cette affaire, la société Air France avait signé avec plusieurs organisations syndicales un accord d’entreprise relatif à la mise en place des comités sociaux et économiques des établissements et du comité social économique central d’entreprise, ainsi qu’au périmètre des établissements distincts. Un syndicat, non-signataire de cet accord, en a demandé l’annulation devant les juges du fond et a sollicité la mise en place d’un établissement distinct et d’un comité social et économique propres aux pilotes de ligne en application de l’article L. 2313-2 et suivants du Code du travail.

La Cour d’appel a d’abord énoncé que les critères retenus pour déterminer le nombre et le périmètre des établissements relèvent de la seule liberté des partenaires sociaux, puis a constaté que la représentation des salariés au sein du comité social et économique était bien assurée.

La Cour de cassation valide le raisonnement de la Cour d’appel et rappelle que les signataires d’un accord conclu selon les conditions mentionnées aux articles L. 2313-2 et L. 2313-3 du Code du travail déterminent librement les critères permettant la fixation du nombre et du périmètre des établissements distincts au sein de l’entreprise, à la condition toutefois qu’ils soient de nature à permettre la représentation des salariés.

Cass. soc., 1er février 2023, n° 21-15.371.

 

Précisions sur l’indemnisation des travailleurs exposés à l’amiante

Dans deux arrêts du 8 février 2023, la Cour de cassation a enrichi sa jurisprudence sur l’indemnisation des travailleurs exposés à l’amiante.

  • L’utilisation illicite de l’amiante constitue un manquement de l’employeur à son obligation de loyauté

Dans les faits d’espèce du premier arrêt, l’employeur avait bénéficié d’une dérogation l’autorisant à poursuivre l’utilisation de l’amiante jusqu’au 31 décembre 2001, malgré l’entrée en vigueur du décret 96-1133 du 24 décembre 1996 relatif à l’interdiction de l’amiante, et continué, en toute illégalité, à utiliser ce matériau pendant trois ans alors qu’il n’était plus titulaire d’aucune autorisation dérogatoire.

La Cour d’appel a considéré qu’en continuant à utiliser ce matériau sans autorisation dérogatoire, l’employeur a manqué à son obligation d’exécuter de bonne foi les contrats de travail.

La Cour de cassation valide le raisonnement de la Cour d’appel et rappelle qu’il résulte de l’article L. 1222-1 du Code du travail que l’atteinte à la dignité de son salarié constitue pour l’employeur un manquement grave à son obligation d’exécuter de bonne foi le contrat de travail.

  • L’action en réparation du préjudice d’anxiété peut être dirigée contre l’entreprise utilisatrice

Dans les faits d’espèce du second arrêt, un salarié exposé à l’amiante sollicitait, tant contre son employeur que contre l’entreprise utilisatrice, la réparation du préjudice d’anxiété qu’il estimait avoir subi.

La Cour d’appel a décidé que si l’entreprise utilisatrice n’était pas liée au demandeur par un contrat de travail et que, à ce titre, sa responsabilité ne pouvait être recherchée sur le fondement de l’obligation de sécurité à la charge de l’employeur, sa responsabilité pouvait néanmoins être engagée au titre de la responsabilité extracontractuelle dès lors qu’étaient établies des fautes ou négligences de sa part dans l’exécution des obligations légales et réglementaires mises à sa charge en sa qualité d’entreprise utilisatrice, qui ont été la cause du dommage allégué.

La Cour de cassation valide le raisonnement de la Cour d’appel et rappelle que les dispositions du Code du travail n’interdisent pas au salarié de l’entreprise extérieure de rechercher la responsabilité de l’entreprise utilisatrice, s’il démontre que celle-ci a manqué aux obligations mises à sa charge par la loi et que ce manquement lui a causé un dommage.

Cass. soc., 8 février 2023, n° 20-23.312 ; n° 21-14.451.

 

Précisions sur les conditions de validité d’un accord de performance collective

Dans les faits de l’espèce, un accord de performance collective avait été conclu au sein d’une entreprise, dont le principal objet était de réunir les différents sites de l’entreprise au siège. Plusieurs salariés, qui avaient refusé de signer l’avenant à leur contrat de travail, avaient été licenciés. C’est dans ce contexte qu’un syndicat et plusieurs salariés sollicitaient l’annulation de l’accord de performance devant les juges du fond.

En première instance, le Tribunal judiciaire a rejeté cette demande et validé l’accord.

  • Un accord de performance collective peut être conclu par les élus au CSE

Dans cet arrêt, la Cour d’appel était tout d’abord amenée à se prononcer sur la validité des conditions de conclusion de l’accord de performance collective en cause. Dans les faits de l’espèce, l’entreprise comptait en effet moins de 50 salariés et n’avait donc pas de délégués syndicaux. L’accord avait donc été signé par les membres du CSE.

La Cour d’appel a toutefois estimé que l’entreprise avait légalement la possibilité de conclure un accord de performance collective avec les salariés élus au comité social et économique dans les conditions prévues aux articles L. 2232-23-1 et suivants du Code du travail.

  • Un accord de performance collective entaché de deux irrégularités

Les appelants contestaient également la validité de l’accord au motif, d’une part qu’il organise la fermeture d’un site et, d’autre part, qu’il a abouti à une compression des effectifs, les salariés licenciés pour n’avoir pas accepté la modification de leur contrat de travail n’ayant pas été remplacés.

La Cour d’appel a suivi leur raisonnement et fait droit à leur demande en déclarant la nullité de l’accord de performance collective, estimant que ce dernier était entaché de deux irrégularités puisque :

  • D’une part, un accord de performance collective ne peut avoir pour objet ou pour effet de supprimer des postes ;
  • D’autre part, il appartenait à l’employeur soit de procéder lui-même à la consultation des salariés, soit de s’assurer que les salariés élus y procéderaient dans le cadre d’un accord de méthode.

CA Nancy, 6 février 2023, n° 21/03.031.

 

Le nombre de salariés concernés par l’inexécution d’un accord collectif est sans incidence sur le droit d’agir du syndicat

Dans les faits de l’espèce, avait été conclu un accord collectif relatif au processus de concertation et aux mesures d’accompagnement des réorganisations de l’entreprise. Estimant que la réorganisation engendrée était intervenue en violation des dispositions de l’accord collectif, plusieurs syndicats ont assigné deux sociétés devant les juges du fond aux fins d’obtenir le paiement de dommages-intérêts au titre de l’atteinte portée, selon eux, à l’intérêt collectif de la profession. Les deux sociétés mises en cause ont alors opposé une fin de non-recevoir tirée de l’absence d’intérêt à agir des syndicats, estimant qu’un faible nombre de salariés étaient concernés par les manquements allégués.

La Cour d’appel leur a donné raison et a déclaré irrecevable l’action des syndicats, estimant que, compte tenu du nombre de salariés concernés par cette violation, il n’était pas démontré que l’ensemble de la profession représentée par ces syndicats avait subi un préjudice, même indirect, résultant des manquements invoqués.

La Cour de cassation ne suit pas le raisonnement de la Cour d’appel et rappelle, au visa de l’article L. 2132-3 du Code du travail, que l’action introduite par un syndicat sur le fondement de cet article est recevable du seul fait que ladite action repose sur l’inexécution des dispositions d’une convention ou d’un accord collectif qui cause nécessairement un préjudice à l’intérêt collectif de la profession, la circonstance que seuls quelques salariés concernés par cette violation étant sans incidence sur le droit d’agir du syndicat.

Cass. soc., 15 févr. 2023, n° 21-22.030.

 

Saga Uber : Les contrats de partenariat qui lient les chauffeurs à la société Uber sont requalifiés en contrat de travail

Dans les faits de l’espèce, un chauffeur, qui était jusqu’ici lié à Uber par un contrat de partenariat, réclamait la requalification de sa relation avec les sociétés Uber BV et Uber France SAS en contrat de travail.

Le Conseil de Prud’hommes fait droit à sa demande et estime notamment qu’un lien de subordination est caractérisé, compte tenu :

  • Du système de géolocalisation : les juges du fond rappellent que la société ne se limite pas à obtenir la localisation du chauffeur et opère en réalité un contrôle du respect du parcours imposé ;
  • Du pouvoir de sanction : les juges du fond assimilent le mécanisme de déconnexion du chauffeur de la plateforme à la suite de trois refus de courses à une sanction à caractère pécuniaire qui oblige les chauffeurs à prendre toutes les propositions de courses ;
  • De l’appartenance des chauffeurs à un service organisé : les juges du fond observent que les chauffeurs ne peuvent pas fixer les tarifs et les conditions d’exercice de la prestation de transport, lesquels sont entièrement régis par Uber.

CPH Lyon, 20 janvier 2023, n° 20/00.746.