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Newsletter 29 mars 2024

Smart News | Droit de la construction et de l’urbanisme

Aurélie Dauger et Hélène Cloëz vous proposent de retrouver régulièrement une sélection de l’actualité légale et jurisprudentielle en droit de la construction et de l’urbanisme.

Droit de la construction

Actualités jurisprudentielles Construction : L’assureur peut être appelé en garantie sans nécessité de mise en cause de l’assuré

Cass. 3ème, 1er février 2024 n° 61 – FS-B, n° 22-21025

Un maître d’ouvrage et la société exploitante d’un bâtiment à usage commercial et à destination de grandes surfaces se plaignent notamment de désordres affectant les travaux de carrelage réalisés par le sous-traitant d’une entreprise principale.

L’assureur de l’entreprise principale appelle en intervention forcée l’assureur du sous-traitant.

La Cour d’appel déclare cet appel en garantie irrecevable aux motifs que l’assuré n’a pas été mis en cause de l’assuré, ce que l’entreprise principale n’avait pas fait.

La Cour de cassation censure cette décision en rappelant:

  • « la mise en cause de l’assuré n’est pas une condition de la recevabilité de l’action directe du tiers lésé »,
  • et qu’il en est de même « lorsque l’action exercée n’est pas l’action directe du tiers lésé mais un appel en garantie formé par le responsable des dommages » .

Qu’est-ce que ça implique ?

Le régime de l’action directe du tiers lésé, ou celui de l’appel en garantie formé par le responsable des dommages répondent à la même règle : la recevabilité de ces actions n’est pas subordonnée à la mise en cause de l’assuré.

Actualités jurisprudentielles Construction : Le large champ des prestations pouvant entrer dans la notion de sous-traitance

Cass. 3ème, 18 janvier 2024 n° 61 – FS-B, n° 22-20.995

Un maître d’ouvrage conclut avec une entreprise générale un marché de terrassement et de démolition, qui les sous-traite à une seconde entreprise qui sous-traite les prestations d’enlèvement, de transport et de traitement des terres extraites du site, à une tierce entreprise.

A la suite de la liquidation judiciaire du sous-traitant de rang 1, le sous-traitant de second rang assigne le maître d’ouvrage en indemnisation de ses préjudices et lui reproche de ne pas avoir satisfait à ses obligations imposées par la loi  n°75-1334 du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance.

Le maître d’ouvrage soutenait que l’entreprise de second rang:

  • ne pouvait être considéré comme « sous-traitant » l’entrepreneur qui ne participait pas directement par apport de conception, d’industrie ou de matière à l’acte de construire, objet du contrat principal mais seulement de l’évacuation des terres,
  • et que les prestations de transport et de traitement des déchets d’un chantier de construction ne participent pas directement à l’acte de construire d’un ouvrage immobilier, de sorte que celui qui les exécute ne peut se prévaloir de la qualité de sous-traitant à l’égard du maître de l’ouvrage,
  • de sorte ne pouvait se prévaloir de la qualité de sous-traitant.

Les juges du fond condamnent le sous-traitant de second rang pouvant être considérée comme un sous-traitant au sens de la loi de 1975.

La Cour de cassation les approuve :

  • l’article 1er de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 dit qu’a la qualité de sous-traitant celui qui exécute, au moyen d’un contrat d’entreprise, tout ou partie d’un contrat d’entreprise conclu entre le maître de l’ouvrage et l’entrepreneur principal,
  • les prestations d’évacuation, de transport et de traitement des déchets du chantier de construction, par leur nature et complexité, participaient à l’exécution du contrat d’entreprise principale.

Qu’est-ce que ça implique ?

Le Maître d’ouvrage doit être vigilant aux entreprises qui interviennent sur le chantier. Il peut lui être reproché, d’avoir connaissance de l’existence d’un sous-traitant sur un chantier mais de s’être abstenu de mettre en demeure l’entrepreneur principal de s’acquitter des obligations qui lui incombent en lui présentant le sous-traitant, faisant perdre à ce dernier le bénéfice de l’action directe.

Actualités jurisprudentielles Urbanisme : Sanction d’un changement de destination irrégulier

Cass. Crim. 6 février 2024 n° 23-81,748, et 27 février 2024, n° 23-82,639

La chambre criminelle de la Cour de cassation a rendu deux importantes décisions, sur des changements de destination irréguliers.

Elle a en effet considéré qu’il se déduit des articles L 151-9, L 480-4 et L 610-1 du  Code de l’urbanisme que : « Le fait d’affecter à une utilisation contraire aux dispositions du plan local d’urbanisme des constructions régulièrement édifiées en vue d’une autre affectation constitue une violation de ce plan et le délit prévu à l’article L, 610 du code de l’urbanisme ».

Ainsi, constitue une infraction, le simple fait d’utiliser des locaux de manière non conforme à celle autorisée par le PLU et ce, quand bien même les règles du PLU se borneraient à n’interdire que « les constructions » relevant de certaines destinations, sans viser l’utilisation de ces constructions.

Il suffit que l’infraction porte sur une simple utilisation non conforme au PLU, pour que le juge puisse ordonner la mise en conformité des lieux. Il n’est pas nécessaire que des travaux ait été effectués.

Qu’est-ce que ça implique ?

Il faut veiller à ce que l’utilisation d’un local soit conforme au PLU sous peine de sanction pénale et ce quand bien même il n’y aurait pas eu de travaux ou que la construction respecterait par elle-même les règles du PLU.

Actualités jurisprudentielles Urbanisme : Toujours plus de possibilité de régulariser un PC par un PCM devant le juge administratif

Conseil d’Etat 11 mars 2024 n° 463413

On se souvient que par une décision du 2 octobre 2020, n° 438318, le Conseil d’Etat avait considéré qu’un « vice entachant le bien-fondé de l’autorisation d’urbanisme est susceptible d’être régularisé, même si cette régularisation implique de revoir l’économie générale du projet en cause, dès lors que les règles d’urbanisme en vigueur à la date à laquelle le juge statue permettent une mesure de régularisation qui n’implique pas d’apporter à ce projet un bouleversement tel qu’il en changerait la nature même ».

Dans l’arrêt du 11 mars 2024, alors que la Cour avait écarté la possibilité de régulariser le manque d’une place de stationnement car la réalisation de celle-ci était techniquement impossible, le Conseil d’Etat a considéré que la Cour aurait dû tenir compte « de la possibilité pour le pétitionnaire de faire évoluer son projet et d’en revoir, le cas échéant, l’économie générale sans en changer la nature ».

Qu’est-ce que ça implique ?

Un pétitionnaire peut faire évoluer son projet pour éviter l’annulation de son permis de construire, la seule limite étant désormais de ne pas pouvoir « en changer la nature »