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16 juin 2020

Le Guide des Affaires Chine de Business France | Quelles loi et juridiction appliquer à un contrat avec une entreprise chinoise ?

Avoir au minimum un contrat commercial est une nécessité en Chine quand une société étrangère souhaite faire des affaires avec un partenaire chinois. Il ne faut pas en négliger sa rédaction d’autant que cet acte va permettre de figer les relations entre les parties à un instant donné et déterminer les conditions de sa réalisation au cours de sa durée. Ce contrat commercial peut être amené à évoluer et il peut aussi du fait de l’une ou l’autre des parties arriver à son terme plus tôt que prévu, en aboutissant à un accord à l’amiable ou à un contentieux. Il est donc essentiel dès la rédaction de ce contrat de se poser la question de la loi et de la juridiction applicables et anticiper à ce moment où risque d’avoir lieu le litige et surtout où devra être exécutée la décision rendue, au besoin par le recours à des mesures d’exécution forcée.

Opter pour l’arbitrage ou un tribunal à l’étranger est de nature à apporter des garanties d’indépendance et d’impartialité en soustrayant le contentieux à l’emprise possible du partenaire local, tout en permettant dans certains cas une décision équitable ou plus favorable à la société étrangère. Mais il convient en premier lieu de s’assurer qu’un tel choix peux valablement ou utilement produire des effets en Chine, particulièrement si le partenaire chinois ne dispose pas d’actifs en dehors de Chine car c’est alors en Chine que l’on va rechercher l’exécution de la décision rendue. Si l’exécution d’une décision ou sentence arbitrale étrangère en Chine ne peut pas avoir lieu ou est retardée du fait des procédures locales, les conséquences en pratique peuvent s’avérer coûteuses. Outre la perte d’un temps considérable et de frais de justice importants en cas de refus de reconnaissance ou d’exécution en Chine, on peut ainsi se retrouver dans une situation où une décision a été rendue en faveur d’une entreprise étrangère sans que cela empêche la contrepartie chinoise d’organiser son insolvabilité, fermer son usine, transférer ses actifs, ou encore continuer à utiliser la marque ou les produits contrefaits pendant une durée telle que les dommages subis par l’entreprise étrangère seront sans mesure avec ceux qui ont été reconnus ou que visaient à prévenir la décision.

La Chine est partie à la convention de la Haye relative à la signification et à la notification à l’étranger des actes judiciaires et extra judiciaires en matière civile ou commerciale. Elle n’est en revanche pas partie à la convention de La Haye sur la reconnaissance et l’exécution des jugements étrangers en matière civile et commerciale, et à cet égard il est généralement difficile d’obtenir la reconnaissance et l’exécution en Chine de jugements rendus par des juridictions étrangères. Le choix d’un tribunal étranger est donc à proscrire lorsque le lieu d’exécution des décisions rendues sera la Chine. La situation de l’arbitrage étranger est plus favorable, la Chine étant partie à la convention de New-York de 1958 sur la reconnaissance et l’exécution des sentences arbitrales étrangères. Il faut cependant garder à l’esprit que bien que les tribunaux chinois reconnaissent et exécutent généralement les sentences arbitrales étrangères émises par des organismes d’arbitrage étrangers reconnus, l’exécution peut en pratique prendre plus d’un an. Dans certains cas même, on a pu voir les tribunaux chinois faire stagner les affaires de sentences arbitrales étrangères pendant des années pour en éviter l’exécution. Il est par ailleurs notable que la reconnaissance et l’exécution de décisions arbitrales rendues à Hong Kong ou Macao se font de manière plus rapide et spontanée.

Pour éviter de se retrouver dans une telle situation, il peut être parfois préférable de réfléchir à opter pour l’application d’une loi chinoise et la compétence des tribunaux chinois. En effet, au regard des articles 3 et 327 du code de procédure civile de République Populaire de Chine, une société étrangère a tout à fait la possibilité de poursuivre une société chinoise devant les tribunaux chinois. Ces derniers ont donc ainsi le droit de juger les affaires internationales impliquant un demandeur étranger contre une entreprise chinoise. Il existe en outre plusieurs centres d’arbitrage international en Chine, tels que la CIETAC ou la SHIAC, qui traitent chaque année d’un nombre important de litiges internationaux et comportent en leur sein des arbitres étrangers de toutes nationalités. Plusieurs moyens également sont mis à disposition pour permettre d’éviter l’organisation de la faillite de la société chinoise comme par exemple la possibilité de mettre en place le gel des comptes du client qui ne voudrait pas payer une créance.

Bien entendu, chaque cas est différent et le choix de la loi ou de la juridiction applicable ne peut se faire sans une analyse globale de la situation et de ses enjeux stratégiques et financiers.

Fanny Nguyen, Associée, LPA CGR Shanghai