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Aurélie Dauger et Hélène Cloëz vous propose de retrouver régulièrement une sélection de l’actualité légale et jurisprudentielle en droit de la construction et de l’urbanisme.

Droit de la construction

Du nouveau sur les troubles anormaux de voisinage, action oblique et tierce opposition

Cass., civ. 3ème, 8 avril 2021, n°20-18.327

La notion de trouble anormal de voisinage peut parfois permettre à un tiers d’interférer dans une relation de droit, contractuelle ou quasi-délictuelle.

C’est ainsi que la Cour de Cassation a jugé, pour la première fois, qu’un copropriétaire peut exercer une action oblique en résiliation du bail conclu par un autre copropriétaire, avec un locataire qui lui cause un trouble anormal de voisinage, en violation de la clause du règlement de copropriété interdisant que soient causés de tels troubles. Classiquement lorsque le bailleur n’agissait pas, seul le syndicat des copropriétaires pouvait agir en résiliation du bail pour faire respecter le règlement de copropriété. Désormais, la Cour de Cassation considère qu’à défaut d’action du syndicat, tout copropriétaire qui subit un trouble peut agir à sa place en résiliation du bail, afin de faire cesser ledit trouble. (1er arrêt)

Ce que cela implique

Bailleur et preneur doivent veiller, lorsque le second entreprend des travaux, à bien imposer aux entreprises de les réaliser dans le respect du règlement de copropriété.

Du nouveau sur la garantie de parfait achèvement / interruption

Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 15 avril 2021, 19-25.748, Publié au bulletin

Aux termes de l’assignation qu’il fait délivrer à l’entreprise à l’issue du délai de parfait achèvement, le maître d’ouvrage dénonce un certain nombre de dommages de parfait achèvement, qui n’avaient jamais été notifiés à l’entreprise.

Suivant le principe selon lequel une assignation vaut mise en demeure, cette dénonciation n’aurait pas dû poser de problèmes.

Toutefois, ce n’est pas ce qu’a retenu la Cour de cassation, qui a considéré que le maître d’ouvrage ne pouvait pas bénéficier de la garantie de parfait achèvement au motif de « l’absence de notification préalable à l’entrepreneur des désordres révélés postérieurement à la réception, qu’une assignation, même délivrée avant l’expiration du délai d’un an prévu à l’article 1792-6 du Code civil, ne peut suppléer ».

Ce que cela implique

Le bénéficiaire de le garantie de parfait achèvement doit dénoncer l’apparition des désordres par une notification écrite distincte de l’assignation et qui lui est préalable.

Les assignations « balai » de GPA sont donc à proscrire !

Du nouveau sur la non-conformité des travaux aux DTU

Cass., civ. 3ème, 10 juin 2021, n°15-15277

La non-conformité de l’ouvrage aux DTU qui n’entraine pas de désordre ne peut pas engager la responsabilité la responsabilité du constructeur si cette norme n’a pas été contractualisée.

La Cour de cassation réitère ainsi une solution énoncée dans un arrêt précédent de 2001 ; l’entreprise n’est donc tenue de respecter les DTU applicables à son champ d’activité que si ceux-ci ont été intégrés au champ contractuel ce qui est logique dès lors que ces normes, édictées par des organes de représentation des professions, sont dépourvues de caractère réglementaire.

Cette solution pose la question de la distinction entre DTU et règles de l’art.

Ce que cela implique

Dans le cadre des marchés de travaux, il faut donc être vigilant et contractualiser les DTU afin de faciliter la preuve de la faute de l’entreprise en cas de désordres intermédiaires.

Droit de l’urbanisme

Du nouveau sur le changement de destination

La destination des bâtiments en urbanisme correspond à ce pourquoi une construction est édifiée. Elles sont définies dans chaque PLU.

Les destinations possèdent deux régimes temporels distincts du fait de la réforme entrée en vigueur le 1er janvier 2016 :

  • Celui applicable aux PLU en vigueur au 1er janvier 2016 et qui n’ont pas fait l’objet d’une procédure de révision à compter de cette date. Les destinations sont définies à l’article R. 123-9 du code de l’urbanisme, elles sont au nombre de neuf. Les changements destinations (articles R. 421-14 et R. 421-17 du code) sont instruits au regard de ces anciennes destinations.

    A titre d’exemple, la Ville de Paris estimait jusqu’à présent qu’elle était en présence d’un changement de destination lorsqu’on passait d’une destination à une autre au sens de l’ancien article R. 123-9 du code de l’urbanisme faute pour le PLU d’avoir été révisé (cette pratique de la Ville de Paris a été validée par le tribunal administratif de Paris : TA, 7 février 2019, n° 1719507).

  • Celui postérieur au 1er janvier 2016 pour les PLU élaborés ou révisés à partir de cette date. Les destinations sont au nombre de cinq, complétées par vingt sous-destinations définies aux articles R. 151-27 et R. 151-28 du code de l’urbanisme. Les changements destinations sont instruits au regard de ces nouvelle destinations.

Dans cet arrêt du 20 mai 2021, la cour a considéré que pour déterminer si un changement de destination est soumis à permis de construire ou à déclaration préalable il convient de se référer aux nouvelles destinations et sous-destinations des articles R. 151-27 et R. 151-28 du code de l’urbanisme, même lorsque le PLU applicable au projet n’a pas été révisé et fait encore référence aux anciennes destinations de l’article R. 123-9 de ce code.

La cour a donc retenu une interprétation littérale (i) des dispositions transitoires de l’article 12 VI du décret n° 2015-1783 du 28 décembre 2015 et (ii) des dispositions des articles R. 421-13 et suivants du code de l’urbanisme relatives aux changements de destinations.

Ce que cela implique

Dans les communes dotées d’un PLU non-révisé depuis le 1er janvier 2016, les changements de destinations des bâtiments existants doivent s’apprécier au regard des nouvelles destinations. En revanche, il faut se référer aux anciennes destinations pour s’assurer du respect par le projet des règles du PLU.