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Aurélie Dauger et Hélène Cloëz vous proposent de retrouver régulièrement une sélection de l’actualité légale et jurisprudentielle en droit de la construction et de l’urbanisme.

Droit de la construction

Du nouveau sur la reconstruction d’un bâtiment en ruine qui n’est pas une construction neuve au sens du droit des biens

Cass., civ. 3è, 9 septembre 2021, n°20-15.713

Un couple avait entièrement remis à neuf une ruine se trouvant sur le terrain d’un tiers. Une incertitude existait quant à la convention qui les avait autorisé à occuper ce terrain, le propriétaire estimant n’avoir consenti qu’une convention d’occupation précaire. Alors qu’il souhaitait récupérer la jouissance de son terrain, le couple l’a assigné en indemnisation de leurs travaux de restauration.

Après avoir été condamnés en appel à enlever à leurs frais leur construction, la Cour de cassation a cassé l’arrêt au motif que l’article 555 du Code civil n’était pas applicable, en l’absence d’une construction neuve. En effet, ne peut, selon elle, être assimilée à une construction neuve, la remise en état et la viabilisation d’une ruine avec sol en terre battue, toiture et plancher effondré, sans eau courante ni électricité ; parallèlement, elle estime que la seule préexistence des murs suffit à caractériser une rénovation.

Ce que cela implique

Traditionnellement, on considère que le régime de la VEFA s’applique à l’exclusion de celui de la vente d’immeuble à rénover, lorsque l’on remet à neuf 50% du gros œuvre et/ou 75% du second-œuvre. L’avenir dira si cette décision amorce un revirement dans ce domaine, ou doit être cantonnée au champ du droit des biens.

Du nouveau sur la mention de la police CNR et DO dans l’acte authentique de vente

Cass., civ. 1ère , 30 juin 2021, n°19-24.718

Cet arrêt d’espèce rappelle l’obligation pour le notaire de faire état de l’existence, ou non, d’une assurance « constructeur non réalisateur » ou « dommages-ouvrage » dans l’acte de vente ou ses annexes dès lors que le vendeur est susceptible de voir sa responsabilité décennale engagée sur le fondement de la présomption établie par les articles 1792 et suivants du Code civil.

A défaut, la responsabilité du notaire peut être engagée et sa condamnation au titre de la perte de chance pour l’acquéreur (i) de mesurer les risques qu’il prenait en faisant l’acquisition d’un bien dépourvu de ces assurances alors qu’il a fait l’objet d’une rénovation lourde (ii) et donc de négocier un prix différent.

A noter néanmoins la censure de la haute juridiction au motif que l’acquéreur avait été indemnisé deux fois : une première fois au travers de la condamnation du vendeur à la réparation de l’intégralité des désordres et une seconde, par celle du notaire pour la perte de chance de négocier un prix plus avantageux.

Ce que cela implique

Depuis la loi n°2015-990 du 6 août 2015 (art. 95) le notaire à l’obligation de faire figurer la souscription  des assurances obligatoires des articles L.241-1 à L.242-1 du Code des assurances lorsqu’elles s’appliquent. A noter qu’il doit joindre également l’attestation CNR (étonnamment, l’attestation DO n’est pas visée par la loi).

Du nouveau sur les DO et déclaration de sinistre renouvelée

Cass., civ. 3ème, 30 septembre 2021, n°20-18.883

L’assureur dommages-ouvrage est tenu de répondre dans le délai de soixante jours prévu à l’article L. 242-1 du code des assurances, à toute déclaration de sinistre, y compris lorsqu’il estime que les désordres sont identiques à ceux dénoncés dans une précédente déclaration de sinistre.

A défaut, sa garantie est acquise et il ne peut se prévaloir de la prescription de l’action assuré / assureur de deux ans de l’article L 114-1 du Code des assurances.

Ce faisant, la Cour de cassation revient à la sévérité de La solution dégagée en 2003 (Cass. civ. 3ème 26 novembre 2003 n°01-12.467) qui avait un temps été infléchie par un arrêt de 2012.

Ce que cela implique

En cas de refus de garantie ou de garantie insuffisante, le maître d’ouvrage a donc donc la possibilité (i) de procéder à une nouvelle déclaration de sinistre qui fait courir à nouveau les délais légaux (ii) ou de contester le refus de garantie, qui n’est lui pas encadré légalement ni temporellement.

Du nouveau sur le Guide OPPBTP

A noter : une 15ème version du guide OPPBTP « Préconisation de sécurité sanitaire pour la continuité des activités de la construction en période d’épidémie de Coronavirus Sars – Cov – 2 » vient de paraître.

Il s’agit à nouveau d’ajuster le guide sur les évolutions de la situation sanitaire française ; précisément cette dernière version du 22 septembre 2021 a évolué sur 2 points:

-l’obligation vaccinale des ouvriers pour les interventions de longue durée ou en régie réalisées au sein d’un établissement de santé, social ou médico-social, ceci en conformément aux recommandations du Haut Conseil de la Santé Publique et de l’Etat ;

-pour les ouvriers intervenant dans des chantiers situés dans un ERP, exigence du pass sanitaire vérifié par le responsable de l’établissement en question ou par l’employeur.

Droit de l’urbanisme

Du nouveau sur le respect des règles de compensation des arbres abattus pour la réalisation d’un projet

CAA Paris, 20 septembre 2021, n° 21PA04871

La suspension médiatique du permis de construire un centre nautique lié aux jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 a été l’occasion pour le juge administratif de se prononcer sur l’application la règle de compensation des arbres abattus pour la réalisation du projet.

En l’espèce, le PLUi de Plaine Commune applicable au projet imposait que dans le cas où un arbre de grand développement est abattu, un arbre équivalent soit replanté sur le terrain.

La Cour administrative d’appel de Paris, a jugé que la réalisation du projet qui conduit à abattre 67 arbres (dont 48 sur le terrain d’assiette et 19 en dehors du terrain), alors que le permis de construire n’envisage, au titre de la compensation exigée que la replantation de 47 arbres (dont 35 sur le terrain d’assiette) ne respecte pas le PLUi.

La Cour rappelle que pour l’application de ces dispositions le nombre d’arbres abattus est déterminé compte tenu de l’état du terrain existant à la date du dépôt de la demande, et non en fonction des modifications postérieures de cet état.

La Cour prononce donc la suspension de l’arrêté de permis de construire pour défaut de compensation suffisante des arbres abattus.

Ni sursis à statuer, ni annulation partielle possible pour une autorisation accordée sur une construction initiale illégale

CE, 6 octobre 2021, n° 442182

Suivant une jurisprudence constante, le Conseil d’Etat a jugé dans cette affaire que lorsqu’une construction a été édifiée sans permis de construire ou sans déclaration préalable ou a été transformée sans respecter la déclaration préalable ou le permis de construire obtenu, la demande de travaux nouveaux sur cette construction devra porter à la fois sur les travaux envisagés mais aussi sur les travaux réalisés illégalement afin de les régulariser.

A défaut l’autorité administrative est tenue de rejeter cette demande en invitant son auteur à présenter une demande portant sur l’ensemble du bâtiment. Il s’agit donc de contraindre le pétitionnaire à régulariser complètement l’existant avant de pouvoir y apporter des modifications.

Le Conseil d’Etat indique à cet égard que « lorsque l’autorité administrative, saisie (…) d’une demande ne portant pas sur l’ensemble des éléments qui devaient lui être soumis, a illégalement accordé l’autorisation de construire qui lui était demandée au lieu de refuser de la délivrer et de se borner à inviter le pétitionnaire à présenter une nouvelle demande portant sur l’ensemble des éléments ayant modifié ou modifiant la construction par rapport à ce qui avait été initialement autorisé, cette illégalité ne peut être regardée comme un vice susceptible de faire l’objet d’une mesure de régularisation en application de l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme ou d’une annulation partielle en application de l’article L. 600-5 du même code ».

Par suite, l’autorisation accordée sur une construction initiale illégale et qui n’a pas été régularisée doit être totalement annulée et ne peut bénéficier, devant le juge, ni d’un sursis à statuer, ni d’une annulation partielle.